Canyons

Au cours de ces dernières années, le laboratoire Environnement Profond a développé deux programmes successifs pour explorer la dynamique des canyons sous-marins et son effet sur les écosystèmes profonds. L’un concerne le canyon du Congo dans le golfe de Guinée (1) et l’autre, le canyon du Var en Méditerranée (2).

(1) Le programme environnemental à long terme et pluridisciplinaire « Biozaïre » sur la marge ouest équatoriale africaine, mené en partenariat avec la société Total, visait à caractériser la structure des communautés benthiques profondes en relation avec les processus physiques et chimiques sur des sites d'étude allant de 350 à 4800 m de profondeur d'eau à proximité du canyon sous-marin du Congo ou à l'abri de son influence.

Les huit campagnes hauturières réalisées entre 2000 et 2005 ont permis à la fois un suivi temporel des conditions du milieu par la mise en oeuvre de mouillages long terme et un échantillonnage séquentiel de l’eau, du sédiment et des communautés benthiques. Une avancée notable a été réalisée dans la connaissance des conditions du milieu et des communautés benthiques à l'échelle régionale et locale de la marge équatoriale de l'Atlantique Est.

Les conditions hydrologiques ont été décrites à l’échelle régionale et plusieurs évènements turbiditiques ont été détectés dans le canyon du Congo. Ces études ont permis de mettre en évidence que les transferts de matière d’origine continentale vers l’océan profond par le canyon étaient particulièrement abondants et riches en matière organique.

Une des conséquences notables de ces phénomènes est la présence dans la zone des lobes terminaux de l’éventail profond d’un milieu exceptionnel en milieu abyssal (taux de sédimentation élevé et richesse en matière organique) où se développent des communautés biologiques typiques des milieux réduits, proches de celles des sources froides.

Les communautés abyssales subissent les effets de la dynamique liée à la présence du canyon, effets positifs en termes d’apports nutritifs contrecarrés par les effets perturbateurs des événements turbiditiques. Il en résulte une complexité de l’habitat qui engendre des communautés sédimentaires riches et diversifiées.

 

(2) Le deuxième programme était un des volets du projet européen Hermès (2005-2008) et avait pour thème l’étude de la dynamique des canyons sous-marins de la marge européenne. C’est dans ce cadre que le projet Envar a été développé afin d’étudier le canyon du Var au large de Nice, dans la prolongation des travaux réalisés autour du canyon du Congo.

Cette étude visait d’abord à analyser le rôle des crues du fleuve Var sur le déclenchement d’avalanches sous-marines dans le canyon. Les conséquences écologiques de ces transports très rapides de matériel terrigène vers les grands fonds de la Méditerranée ont été évaluées.

Deux ans de mesures dans le canyon du Var de 2005 à 2008, à des profondeurs allant de 1200 à 2350 m, indiquent que six des crues de la rivière Var, observées dans la période d’étude, ont déclenché des courants hyperpycnaux, un mécanisme gravitaire récurrent pour le transport de matières particulaires canalisées par un canyon.

Ces écoulements de sédiments se caractérisent par une augmentation soudaine de la vitesse du courant et par des flux de particules atteignant jusqu'à 600 g/m2/jour. L’impact de ces apports de sédiments et de matière organique fraîche et des perturbations induites a été évalué sur les écosystèmes benthiques profonds et sur le stockage du carbone dans la Méditerranée.

Plus récemment, le programme Solveig (coordonné par le Laboratoire REM/GM/LES) a pris le relais du programme Envar avec des problématiques similaires mais à une échelle plus fine afin de mieux caractériser et de modéliser les avalanches sous-marines. Cette étude se poursuit en 2013 avec pour but principal une meilleure compréhension de la formation des courants de turbidité au débouché du fleuve Var.