De nouveaux systèmes hôtes-virus associés aux sources hydrothermales océaniques profondes

Nos connaissances sur la diversité virale associée aux micro-organismes présents dans les sources hydrothermales océaniques profondes restent encore limitées. Seules quelques études concernant l’abondance virale et l’impact de ceux-ci sur la mortalité microbienne dans ces écosystèmes sont disponibles. En effet, seuls 6 bactériovirus et 2 archéovirus provenant de ces écosystèmes ont été caractérisés à l’heure actuelle. Les deux archéovirus infectent des archées anaérobies hyperthermophiles appartenant à l’ordre des Thermococcales et ont été décrits au laboratoire. Afin d’étendre nos connaissances sur la diversité virale associée aux micro-organismes colonisant ces environnements, il a été décidé d’élargir les recherches à l’ordre bactérien des Thermotogales. Cet ordre bactérien est composé de bactéries chimio-organotrophes anaérobies en majorité thermophiles ou hyperthermophiles. De nombreux transferts latéraux de gènes ont contribué à l’histoire évolutive des Thermotogales supposant une forte implication des virus dans celle-ci. Ces travaux de thèse ont permis la caractérisation fonctionnelle et génomique de deux nouveaux siphovirus, MCV1 et MCV2, infectant deux souches de Marinitoga camini. Ces souches ont été isolées de deux sites hydrothermaux profonds (Menez Gwen et Lucky Strike) au niveau de la dorsale médio-atlantique. Ces virus mettent en œuvre un cycle lysogénique avec une production basale sans induction relativement haute (>107 virions/ml). Une comparaison de ces deux génomes viraux à celui de MPV1, virus précédemment isolé de Marinitoga piezophila, a été réalisée, révélant la présence de nombreuses similarités. Un core genome de 35 ORFs partagé par ces trois génomes a été identifié, incluant des protéines impliquées dans le métabolisme de l’ADN, l’assemblage des virions et le cycle lysogénique. Des protéines hypothétiques ont aussi été identifiées parmi ces gènes communs, elles portent donc probablement des fonctions importantes pour ces bactériovirus. Par ailleurs, 60% des gènes de ces virus ayant une correspondance dans les bases de données, après exclusion des Thermotogales, partagent des similarités avec les Firmicutes et les bactériovirus qui leurs sont associés. Le génome d’une autre Thermotogales, Thermosipho sp. AT1244-VC14 a été étudié ainsi que son système CRISPR-cas. Ces résultats indiquent que cette souche, qui porte un système CRISPR-cas qui semble complet et fonctionnel, a probablement déjà été infectée par MCV1, MCV2 ou un virus similaire. Ces travaux permettent d’étendre nos connaissances sur les virus portés par les bactéries du phylum Thermotogae, encore peu décrits à ce jour. Les éléments génétiques mobiles associés à ce phylum sont particulièrement intéressants car ils ont probablement eu un impact important dans l’évolution de ces communautés microbiennes ainsi que dans leur adaptation aux conditions physico-chimiques extrêmes et fluctuantes présentes dans les écosystèmes qu’elles colonisent.